"Convertir la Pastorale en mission du parvis" Ecclesiam’M 2020 ! Deuxième Chantier de Conversion Pastorale


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dimanche 23 octobre 2016
Diocèse de Martinique

Mgr David Macaire présente le deuxième chantier de conversion pastorale d’Ecclesiam’M 2020 en donnant, dans un premier temps, les raisons d’ouvrir ce chantier, puis en précisant les ateliers synodaux proposés dans le cadre de ce chantier.

LES RAISONS DE CE CHANTIER SYNODAL

EEM : Monseigneur Macaire, le deuxième chantier d’ECCLESIA’M 2020 ! concerne la CONVERSION MISSIONNAIRE DE TOUTE LA PASTORALE. En quoi cela consiste-t-il ?

Ce chantier est la mise en œuvre pratique des documents majeurs du Magistère de l’Eglise ces dernières années dans la vie paroissiale. C’est un chantier essentiel, qui concerne toute l’Eglise Catholique. Récemment encore, j’en ai parlé à Rome avec des évêques du monde entier, de la Caraïbe, de France ou d’ailleurs. En septembre, j’ai travaillé pendant trois jours avec le clergé de la Guyane sur cette problématique. Voici quelques indications :

Evangelii Nuntiandi de Paul VI, Redemptoris Missio & Tertio Millenio adveniente de Jean-Paul II n’ont cessé de nous demander (« nous », c’est chaque chrétien, chaque famille, chaque paroisse, etc.) d’être fondamentalement missionnaires.

Le fameux Document d’Aparecida en 2007, des évêques de l’Amérique Latine et de la Caraïbe, consacre un chapitre entier à ce qu’il appelle « la conversion pastorale et le renouveau missionnaire de nos communautés ». Il déclare ceci, qui doit inspirer nos actions : « Une ferme décision missionnaire doit imprégner toutes les structures ecclésiales et tous les plans pastoraux des diocèses, des paroisses, des communautés religieuses, des mouvements et d’autres institutions de l’Église. Aucune communauté ne doit se dispenser d’entrer résolument, avec toutes ses forces, dans les processus constants de renouveau missionnaire, et d’abandonner les structures caduques qui ne facilitent plus la transmission de la foi » (Aparecida n°362).

Le Synode sur la Nouvelle Evangélisation, dans son message au monde du 26 octobre 2012, déclarait : « C’est à nous aujourd’hui de rendre concrètement accessibles des expériences d’Église, de multiplier les puits auxquels inviter les hommes et les femmes assoiffés, pour faire rencontrer Jésus, véritable oasis dans les déserts de la vie »).

Et surtout la grande Exhortation Apostolique Pastorale du pape François, Evangelii Gaudium (la Joie de l’Evangile), qui est le document pastoral majeur du Pape François : Aujourd’hui, dans cet “allez” de Jésus, nous sommes tous appelés à cette nouvelle “sortie” missionnaire. Tout chrétien et toute communauté discernera quel est le chemin que le Seigneur demande pour sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile » (EG n°20).

Il nous faut donc sans cesse traduire en termes de structures et en actes concrets cette volonté prophétique que l’Esprit communique à nos pasteurs. Notre pastorale doit devenir à 100% missionnaire.

EEM : Pouvez-vous nous expliquer les raisons profondes de cette « Conversion » Pastorale ? Pourquoi !?

Parce que, en raison de circonstances locales et mondiales, nous sommes à un moment de notre histoire où l’équilibre social peut basculer en Martinique. Je l’ai expliqué dans ma lettre pastorale. En parlant de la peur, j’ai fait une référence implicite à la Constitution Pastorale de Vatican II « l’Eglise dans le monde de ce temps ». Celle-ci commence par deux mots « Gaudium et Spes » (les joies et les espoirs), mais les deux autres mots qui suivent sont plus importants, ce sont ceux auxquels le concile va répondre : « luctus et angor », « les angoisses et les tristesses de ce temps ». Le concile avait 50 ans d’avance. Car les angoisses et les tristesses n’ont cessé d’augmenter depuis. La violence semble croître dans le monde et chez nous elle atteint un paroxysme. Une sorte de « 3ème guerre mondiale » nous cerne et nous concerne. Le monde, et notre petite Martinique avec, est devenu une jungle. Il s’en suit une panique sociale systématique organisée par des puissances obscures qui poussent le peuple à deux types majeurs de (mauvaises) réponses : la religion facile et la consommation effrénée.

D’un côté, les mouvements religieux ésotériques et sectaires se développent comme autant de thérapies face aux angoisses suscitées par la culture de mort. Même certains chrétiens offrent une religion où l’expérience de Jésus est avant tout une recherche de consolation personnelle et une fuite du monde. D’autres systèmes plus ou moins archaïques proposent quelques règles morales, alimentaires et vestimentaires, simplistes et rassurantes, où se réfugient les esprits trop tentés par le péché et la violence…

L’autre choix, le plus courant et le plus terrible, face à la terreur ambiante, est de sombrer dans l’hédonisme ambiant et la société de consommation. C’est le fameux « mangeons et buvons car demain nous mourrons » de saint Paul aux Corinthiens… Tant de malheurs sur les enfants de Dieu livrés à Mammon.

EEM : Et vous-même Monseigneur, comment voyez-vous les choses pour la Martinique ?

Merci de me poser la question. J’ose dire que même si le Magistère de l’Eglise ne nous avait pas placés dans cette dimension de la Mission, celle-ci s’avère vitale, VI-TALE, (je pèse mes mots) pour l’Eglise du Christ qui est en Martinique aujourd’hui.

Soyons clairs. Les paroisses de Martinique vont bien et même très bien. Elles sont le Corps du Christ au milieu de la cité des hommes, elles sont vivantes, ferventes et joyeuses. La plupart peuvent encore surfer sur la vague pendant quelques années. Mais le rivage s’approche ! Si l’Eglise s’endort, si nos communautés paroissiales ne convertissent pas leur pastorale en mission, dès aujourd’hui, si elles ne sont pas « en sortie » (comme dit le pape François), elles laisseront les femmes et les hommes de ce pays aux mains des vampires dans des chemins de perdition. Il y aura non-assistance à peuple en danger. Les chrétiens vieilliront alors tranquillement dans l’Eglise, protégés par la foi, les pasteurs et les sacrements. Ils tiendront la route et auront bonne conscience, mais pendant ce temps le monde se perdra, leurs enfants et leurs petits-enfants avec ! Nous aurons à rendre des comptes devant Dieu.

En Martinique, de grands mouvements laïcs ont transformé durablement la société et l’Eglise et ont permis à des milliers de personnes de rencontrer Jésus et d’entrer dans l’Eglise, de faire l’expérience de l’Esprit et de devenir missionnaires. Il y a eu les Confréries, puis l’Action Catholique à partir des années 50 et, plus tard, le Renouveau Charismatique dans les années 80. Le temps est venu pour les paroisses de s’interroger sur leur dynamisme et leur capacité à poursuivre cette mission que les mouvements ont assumée et assument encore. Le pape François insiste beaucoup sur ce point.

Je souhaite que le Conseil Presbytéral se charge de ce dossier. On peut par exemple imaginer qu’un délégué « ECCLESIA’M 2020 ! » par paroisse soit nommé. Ce délégué sera membre du Conseil Paroissial et adjoint du Curé pour engager les mutations nécessaires. Il sera aussi le correspondant paroissial du Secrétariat Général, chargé de faire remonter les difficultés, les progrès, les questions, les suggestions.

EEM : Quelles sont les caractéristiques de la mission des paroisses en Martinique ?

C’est d’abord ce qu’on appelle une Mission du parvis  ! C’est-à-dire que cette mission ne consiste pas, pour l’instant, à aller vers des étrangers ; elle ne nous demande pas encore d’aller vers des gens des autres religions ; elle nous invite avant tout à accueillir ceux qui frappent à notre porte ou qui sont debout sur le parvis sans entrer dans nos églises.

Nos églises sont encore pleines (et encore pas partout), mais il y a plus de 50% d’enfants catéchisés, et un pourcentage plus élevé encore de baptisés ; la pratique est donc médiocre, en fin de compte ! D’un autre côté, des gens frappent à la porte de l’Eglise pour se préparer au mariage, demander des sacrements pour eux-mêmes ou leurs enfants, pour faire célébrer les funérailles de leurs défunts. Jusqu’à aujourd’hui, nous ne considérons pas assez cette situation comme une opportunité missionnaire, un appel de Dieu. Parfois, au contraire, nous avons un accueil administratif qui ne demande qu’un minimum d’implication, et de la part des demandeurs, et de la part surtout des responsables laïcs ou clercs de l’Eglise.

Il arrive même que des gens soient reçus avec peu d’égard ! Cela nourrit un certain ressentiment vis-à-vis de l’Eglise chez ces catholiques non-pratiquants. Je sais que tous ces frères et sœurs ne sont pas simples, ni toujours très cohérents dans leurs demandes et leurs choix de vie. Mais, souvent, ce sont des jeunes adultes et ils sont maintenus en dehors de la communauté. C’est grave. Notre avenir est en jeu.

Pourquoi, d’après vous, certains apostasient, passent à une autre religion, puis changent soudain de vie alors qu’ils ne le faisaient pas chez nous ? ou d’autres, fuyant la « religion », se perdent dans l’oisiveté, la vie facile, l’alcool, la drogue ou les milieux ésotériques !? Tout simplement parce qu’ils ont été accueillis et se sont sentis aimés… ailleurs ! On comprend alors la volonté très ferme du Pape François d’un « état permanent de mission et non d’une simple administration ». Nous souhaitons que nos paroisses « avancent sur le chemin d’une conversion pastorale et missionnaire, qui ne peut laisser les choses comme elles sont » (EG n°25). C’est clair ?

EEM : C’est clair !

LES ATELIERS SYNODAUX

EEM : Alors quels sont les ateliers que vous nous proposez Monseigneur ?

Trois gros ateliers. Les voilà :

L’Accueil dans les paroisses, à l’église et au presbytère : pour établir un dispositif d’accueil à l’église le dimanche et dans les presbytères : bureau, téléphone, site internet… prendre en compte chaque paroissien et répondre positivement à ses demandes.

L’ouverture des portes des Paroisses : pour servir les pauvres, décentraliser la vie paroissiale, établir des programmes paroissiaux d’évangélisation (cours Alpha ?), créer des groupes bibliques, proposer un catéchuménat pour tous et confier des ministères aux jeunes adultes.

La Conversion des structures : pour renouveler régulièrement les cadres et les missions des laïcs, systématiser les Petites Communautés Ecclésiales, et notamment les communautés de quartier.

EEM : Peut-on entrer dans le détail de votre réflexion ?

Oui. Je souhaite qu’il y ait une véritable conversion des comportements d’accueil dans nos églises et nos presbytères. C’est l’élément central de cet atelier, et peut-être même de tout le plan ECCLESIA’M 2020 ! :

L’accueil dans les paroisses, dans les églises et dans les presbytères. Demain matin, si Jésus visite une de nos paroisses sous les traits de quelqu’un de mauvaise vie, si Marie-Madeleine débarque en pleurant ou si Matthieu le débauché arrive au presbytère, comment seront-ils accueillis ? Cette question me fait trembler. Mais je tremble plus encore pour les « vrais gens » qui arrivent à la messe ou au presbytère et qui ne sont pas des chrétiens habitués. J’ai peur pour eux. Sur qui vont-ils tomber ? comment seront-ils reçus ? va-t-on leur expliquer les choses avec patience s’ils font des demandes qui ne correspondent pas à nos critères ? Si quelqu’un vient ou revient à la messe pour la première fois, va-t-il avoir au moins un frère ou une sœur pour lui sourire, lui parler, lui demander « comment il va » ? ou va-t-il faire face à « des chrétiens qui semblent avoir un air de Carême sans Pâques » comme dit le pape François (EG n°6) !? Pour aider les communautés à progresser en ce sens, je demanderai d’ici quelques mois à des « inspecteurs » anonymes, comme pour le guide Michelin, d’aller évaluer l’accueil dans chaque lieu d’Eglise !

EEM : Concrètement, comment cela doit-il se traduire selon vous ?

Voilà quelques éléments que j’espère voir mis en place d’ici 2020 :

Un dispositif d’accueil à l’église : Au moins pour chaque messe, il pourrait y avoir une équipe d’accueil souriante et qui va au-devant des gens, surtout des inconnus et des marginaux, un bureau d’accueil habilité à donner tous les renseignements, une cellule d’écoute pour ceux qui auraient quelques détresses à confier ou besoin d’une écoute particulière, des personnes formées aux premiers secours disponibles et des infrastructures indispensables comme des WC propres ! Certains dimanches, même si nous sommes des centaines (raison de plus !), on gagnerait à rompre l’anonymat ; les paroissiens pourraient porter une étiquette avec leur prénom. C’est quand même inadmissible qu’on ait pris l’habitude d’être des anonymes à la messe alors que sur internet, sur les plateformes téléphoniques, dans les soirées, dans l’avion ou dans les magasins, les gens vous appellent par votre nom ! Déjà certaines paroisses organisent de temps en temps des « bwè-mangé » communautaires. Je pense que de façon simple, conviviale et gratuite, des repas ou des apéros, des agapes fraternelles peuvent être partagés de temps en temps à la sortie des messes, pour que tous puissent échanger et se connaître. Je sais que ce n’est pas dans notre culture antillaise de rester après la messe (même pour le prêtre), mais la culture évolue : d’autres populations s’installent chez nous (ne serait-ce que les touristes) et il y a de plus en plus de personnes seules dans le pays ; tout le monde n’a pas une famille à retrouver le dimanche (… et ça non plus, ce n’était pas dans notre culture !).

Une équipe de Caritas (des membres du Secours Catholique ou de Saint-Vincent de Paul) à chaque messe pourrait se tenir d’astreinte pour porter de l’aide aux nécessiteux qui viendraient à nous demander un secours.

EEM : Tout se passe à l’église et à la messe ?

Non. Le presbytère est souvent le premier contact pour ceux qui ne connaissent rien à la vie paroissiale. C’est donc un lieu majeur de cette pastorale paroissiale du parvis pour ceux qui sont loin ou qui se sont éloignés de l’Eglise. J’insiste donc sur…

Le bon accueil dans les presbytères est capital. Le presbytère est le premier contact pour ceux qui ne connaissent rien à la vie paroissiale. Les locaux qui reçoivent le public, l’accueil téléphonique, la gestion du site internet, les procédures d’inscription au catéchisme ou à tout autre service… tout doit être repensé en vue de l’accueil des personnes les plus éloignées de l’Eglise. Certaines paroisses font des efforts sur ce point. Mais il faut généraliser cet élan. Il est inadmissible qu’on reçoive parfois chez nous un accueil moins chaleureux que dans les administrations ou les magasins. C’est une honte pour le Christ. Je me montrerai sévère envers les personnes (bénévoles ou salariées) qui donneraient un contre-témoignage pendant un service qui représente toute la communauté chrétienne. Cela vaut aussi et en premier lieu pour les prêtres. Il faudra donc que soient formés à l’accueil du public tous ceux qui doivent exercer ce ministère.

D’ores et déjà, je demande qu’on accueille chacun avec amour et patience, notamment les personnes compliquées, éloignées de l’Eglise ou qui se montrent désagréables. Seuls les prêtres, en tant que pasteurs, peuvent refuser des demandes. Si une requête semble incongrue ou en dehors des règles, les responsables doivent répondre : « je ne crois pas que ce soit possible, nous allons demander au curé ». Je souhaite aussi que les gens sachent clairement où et quand ils peuvent voir leur prêtre sans avoir à subir un parcours du combattant.

Un très bel acte pastoral consiste en l’établissement d’une liste de paroissiens : Je pense qu’à l’heure des réseaux sociaux, des facebook et des whatsapp ou tout simplement des emails, chaque personne ou chaque famille pourrait s’inscrire dans une paroisse. Ainsi chaque fidèle pourrait confier ses coordonnées, ses centres d’intérêt, ses disponibilités, ses attentes vis-à-vis de la communauté. Il aurait aussi la possibilité de faire des remarques et des propositions au pasteur et aux responsables. On organiserait des réunions d’accueil pour les nouveaux paroissiens 2 à 3 fois par an avec les prêtres et leurs collaborateurs.

EEM : Une fois que les gens sont accueillis, on continue comme avant ? Quelques sourires suffiront-ils ?

C’est déjà ça ! Mais, je suis d’accord, il faudra aller plus loin et modifier le fonctionnement et les propositions paroissiales. Aujourd’hui, on est trop centré sur nous-mêmes, sur les paroissiens déjà fidèles, sur les locaux déjà existants, sur les horaires déjà en place. Je préconise une opération porte ouverte dans les Paroisses. Je n’ai pas dit une « journée porte ouverte » (ce serait déjà pas mal), une véritable « culture de la porte ouverte » ! Les trois derniers papes nous ont tous demandé d’ouvrir les portes de l’Eglise sans crainte : pour laisser entrer Jésus (Jean-Paul II), pour laisser entrer les gens du parvis (Benoît XVI) ou pour sortir nous-mêmes dans le monde (François). Déjà, dit le pape François, « un des signes concrets de cette ouverture est d’avoir partout des églises avec les portes ouvertes. De sorte que, si quelqu’un veut suivre une motion de l’Esprit et s’approcher pour chercher Dieu, il ne rencontre pas la froideur d’une porte close » (Evangelii Gaudium, n° 47). Ouvrons les portes pour qu’un grand mouvement catéchuménal, le plus large possible, fasse revenir les catholiques dans leur Eglise. Non pas de force, avec des « tu dois », « il faut », mais joyeusement, parce qu’ils se sentiront accueillis et aimés. Ouvrons les portes pour sortir et élargir la vie paroissiale. Elle ne doit plus se cantonner aux bâtiments autour de l’église et du presbytère, mais se répandre dans les quartiers et les maisons et même les rues. Elle ne doit plus continuer à être ultra-concentrée sur la messe du dimanche, mais se prolonger dans bien d’autres réalités toute la semaine (dont l’eucharistie dominicale restera toujours la source et le sommet mais non le tout).

EEM : Que demandez-vous aux paroisses ?

Organisons et proposons des programmes paroissiaux d’évangélisation (par exemple les cours ALPHA qui ne sont pas encore introduits en Martinique et qui ont fait leurs preuves dans beaucoup de pays). Il s’agit de temps de formation sur quelques semaines en fonction des besoins. La culture du Voir-Juger-Agir prend ici toute son ampleur. Si on s’aperçoit qu’il manque de catéchistes, que les jeunes de la rue ne sont pas évangélisés, que les hommes restent au fond de l’église ou que les ados sont victimes de la pornographie etc… on commence par arrêter de se plaindre et de critiquer ! Puis le curé et ses équipes doivent monter intelligemment des programme (de une soirée à plusieurs semaines) qui seront adaptés à chaque public dans les horaires comme dans le contenu (film, témoignage, sortie etc…). Bien-sûr, les services diocésains feront des propositions. Il en sera de même pour la préparation aux sacrements.

J’aimerais que des groupes bibliques voient le jour le plus largement possible. Les fidèles auraient la possibilité de participer chaque semaine, avec des horaires adaptés, à un groupe de lecture biblique animé par des personnes compétentes (avec tous ceux qui se forment actuellement dans le diocèse, j’espère pouvoir missionner officiellement pour ce faire des catéchistes pour adultes). Une méthode mise en place par Mgr Emmanuel Lafont, évêque de la Guyane et responsable pour la Caraïbe de l’Animation Biblique de la Pastorale, pourra être utilisée. Il existe une grande exposition sur la Bible que plusieurs diocèses ont déjà reçue avec grand profit ; cela pourrait être un point de départ. Je compte aussi former dans une « école » un certain nombre de ministres de la prédication pour prêcher, enseigner et suppléer les prêtres et les diacres (en dehors de la messe bien-sûr). Il faudra que toujours et partout on rappelle aux fidèles le kérygme qui fonde notre foi en Jésus-Christ : son incarnation, sa passion, sa mort et sa résurrection.

Les groupes de catéchuménat pourraient aussi s’étendre. Cela nécessitera de repenser la durée de la formation des catéchumènes et de l’accompagnement des néophytes (le catéchuménat est trop long et le néophytat trop court). Déjà, j’ai demandé que toute formation catéchuménale passe par une retraite fondamentale au Foyer de Charité ; on devrait aussi réfléchir à ouvrir ces groupes à davantage de fidèles. Ils deviendraient alors des groupes de formation permanente pour tous.

EEM : La dimension paroissiale est-elle la seule possibilité d’être en Eglise ?

A chaque paroisse, je demande une vraie conversion des structures missionnaires.

Le renouvellement régulier des cadres et des missions des laïcs de la paroisse permettra d’éviter la cléricalisation des laïcs qui détiennent des postes pendant des années. Autant que possible, on fera en sorte de préparer des remplaçants. Je demande aussi de privilégier le ministère des jeunes adultes et des actifs. Les pasteurs devraient leur donner la priorité (et non l’exclusivité) car ils sont trop peu présents parmi les cadres paroissiaux. Attention, pour leur faire de la place, il ne faudra pas seulement remplacer les plus anciens. Il faudra réformer les horaires, les rythmes, les méthodes et les objectifs. Il est certain que le groupe du Rosaire ne pourra pas se réunir à la salle paroissiale le lundi matin à 9h30 s’il est dirigé par une jeune mère de famille célibataire de 35 ans !

La Paroisse est essentielle car elle fédère toutes les autres réalités. C’est la paroisse qui a un pasteur (le « curé ») et qui offre les sacrements du salut et leur préparation. Mais elle ne suffit pas en tant que dimension communautaire et familiale. On a déjà parlé de la famille. Je voudrais aussi insister sur une autre dimension capitale de la vie chrétienne : Les Petites Communautés Ecclésiales (PCE) sans lesquelles aucun baptisé ne vit vraiment la vie chrétienne. Cela est vrai pour tous, même pour les prêtres et l’évêque. Appartenir à une PCE est un élément d’autant plus nécessaire aujourd’hui que les deux autres dimensions de la vie chrétienne, la paroisse et la famille, l’une trop grande et l’autre blessée, n’assurent pas toujours leur rôle. L’objectif est que chaque chrétien adulte, chaque famille ait la possibilité d’appartenir à une PCE.

EEM : Pouvez-vous définir plus clairement ce que vous entendez par PCE ?

J’appelle PCE tous les groupes qui correspondent à la définition suivante : un groupe à taille humaine (moins de 50 personnes) dont les responsables sont formés et missionnés par une autorité légitime, où l’on enseigne régulièrement la foi catholique, où l’on prie habituellement avec d’autres et dans lequel chaque membre, connu et reconnu, peut exercer un service ou une responsabilité au nom de l’Evangile. Ce principe concerne les chorales, les aumôneries, les groupes des différentes pastorales (artistes, hommes, migrants…), les équipes de service (liturgie, fleurs, visiteurs de malades, lecteurs, Caritas…), les groupes de prière du Renouveau, les équipes d’Action Catholique, du Mouvement Chrétien des Retraités et des Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens, les mouvements de la Pastorale Familiale, les communautés nouvelles (Chemin Neuf, Emmanuel, Chemin Néo-Catéchuménal), les Equipes Notre-Dame, les mouvements de jeunes, les groupes bibliques, la Légion de Marie, les tiers-ordres franciscains et dominicains, les groupes de la Prière des mères, de la Croisade des pères, des Hommes du Très-Saint-Sacrement, les « groupes de combat » de Vie et Partage, les Equipes du Rosaire, etc… et, bien entendu, les Communautés de quartier. Chacune de ces réalités vit selon ses charismes propres. Mais je demande que chaque responsable de ces groupes soient conscients de la « charge d’âme » qui lui incombe sous la responsabilité des curés (dans les paroisses) et respecte un cahier des charges minimum (prière, enseignement accompagnement des membres). Que chaque fidèle s’interroge : quelle est ma PCE !?

EEM : Avant, on insistait surtout sur les quartiers, on parlait de communauté de quartier ou de secteur. Est-ce encore à l’ordre du jour ?

Plus que jamais. Mais nous sommes dans une époque de réseaux autres que territoriaux. Je me suis réjoui de constater que plusieurs paroisses de l’île fonctionnent, pour le plus grand bien des fidèles, avec un réseau de communautés de quartier. Je pense par exemple à l’énorme paroisse du Lamentin qui doit en grande partie sa vitalité et son dynamisme aux communautés de secteur. On voit aussi comment des mouvements religieux plus ou moins hétérodoxes envahissent les quartiers où l’Eglise est absente. C’est pourquoi les communautés de quartier sont un enjeu majeur de nos structures paroissiales ! Le Délégué Diocésain proposera des méthodes de travail, des thèmes de réflexion, des questionnaires de Carême ou d’Avent, des rassemblements diocésains, des formations pour les responsables… D’ores et déjà, je demande que les responsables paroissiaux développent en priorité cette dimension de la structure de l’Eglise en visitant les communautés existantes, en nommant des « sentinelles de quartier », en organisant des missions ou des visites pastorales des quartiers par les curés et les services paroissiaux, en restaurant ou créant si nécessaire des chapelles ou des salles communes, en faisant appel aux communautés comme le Chemin Néo-catéchuménal pour développer des catéchèses et des communautés dans les quartiers où cela est nécessaire.

EEM : Monseigneur, ce plan est riche !?

Oui et il me reste encore trois chantiers à vous présenter ! Mais rassurez-vous. D’abord, nous nous donnons au moins jusqu’en 2020 pour mettre les choses en place. Ce n’est pas pour demain matin ! Ensuite, il ne faut pas que tout le monde s’occupe de tout et que l’on retrouve toujours les mêmes sur tous les chantiers et tous les ateliers. Au contraire, ce plan doit être l’occasion de solliciter de nouveaux responsables, notamment des jeunes et des hommes, et que chacun s’en tienne à un seul service. Nos Assemblées Synodales de 2017 seront consacrées à l’organisation du travail. Nous apporterons ce que nous avons et c’est le Seigneur qui multipliera les pains ! Alors tchenbé réd’ !

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