(2 novembre) de la commémoration des fidèles défunts. A cette occasion, nous avons invité le conteur Alain Légares à porter un regard sur l'évolution de notre rapport à la mort.
«Le message de la mort n'est pas quelque chose de morbide, ni de triste. Bien sûr, pour les proches, il y a toujours le manque de cette personne que l'on aimait, qui n'est plus. Mais dans la communauté, la mort te ramène à la réalité, à la vie. Autrefois, on se disait que celui qui était mort n'avait plus à souffrir. On fêtait son soulagement. Tout de suite après son décès, il y avait cette volonté de ne faire qu'un. On faisait appel aux coups de main. Près de la tombe, les gens mettaient fin à des conflits. On avait besoin de ça pour se rencontrer !
" Né en 1947 au Gros-Morne, Alain Légares est un précieux témoin de l'évolution de la société martiniquaise, et d'une époque révolue où la mort était annoncée, de morne en morne, au son de la conque de lambi. Le dernier conteur de veillée mortuaire de l'île confie son sentiment sur notre rapport actuel à la mort, notre tendance à la fuir, et à abandonner progressivement les traditions qui lui donnaient un sens.
" Autrefois, la veillée mortuaire faisait partie d'un monde ritualisé, avec des codes très précis ", indique Alain Légares. " La veillée se déroulait dans cinq espaces distincts. Il y avait la pièce où le mort était exposé, puis l'espace où l'on chantait en latin, les cantiques chrétiens, et la cuisine où l'on préparait la soupe et le "chodo" pour les convives. A l'extérieur de la maison, un espace était réservé aux spécialistes de "tim tim". Un peu plus en retrait, il y avait le conteur entouré des "répondè". A cette époque, le seul moment où l'on pouvait entendre un conte, c'était lors des veillées mortuaires. Et là où il y avait le conte, il n'y avait pas d'enfant, c'était interdit ! " Alain Légares nous rappelle que les conteurs de veillée, comme les pratiquants de danmyé, étaient menacés d'excommunication par l'Eglise catholique. "
Dans le conte traditionnel martiniquais il n'y a pas de morale. Les histoires de "konpè lapen" ou "Ti Jean" vantaient les mérites du "débrouya pa péché", concept de la survie né au temps de l'habitation. "I té ka fè lafèt épi tout moun". Mais pour le conteur "la mort donne cette force de défier la vie, de manger la vie.
La veillée mortuaire, c'était la fête de la vie, à l'occasion de la mort. " La veillée était aussi le lieu de rencontre de la famille, le lieu du pardon et de la réconciliation. "Aujourd'hui, les veillées organisées dans des salles, n'ont plus de sens.
Autrefois, à la Toussaint, les cimetières reprenaient vie, les familles s'y retrouvaient. Mais on a fait un commerce avec tout cela. On a perdu tout ce qui nous ramenait à la famille. Je suis né à la campagne, de la même façon, j'ai vu la dégradation de cet environnement. Après l'arrivée de l'eau courante, la rivière est devenue un dépotoir. On n'a pas préparé les gens à la modernité, on les a amenés à détruire leur propre lumière."
Dossier constitué par Virginie Monlouis-Privat ■
«Le message de la mort n'est pas quelque chose de morbide, ni de triste. Bien sûr, pour les proches, il y a toujours le manque de cette personne que l'on aimait, qui n'est plus. Mais dans la communauté, la mort te ramène à la réalité, à la vie. Autrefois, on se disait que celui qui était mort n'avait plus à souffrir. On fêtait son soulagement. Tout de suite après son décès, il y avait cette volonté de ne faire qu'un. On faisait appel aux coups de main. Près de la tombe, les gens mettaient fin à des conflits. On avait besoin de ça pour se rencontrer !
" Né en 1947 au Gros-Morne, Alain Légares est un précieux témoin de l'évolution de la société martiniquaise, et d'une époque révolue où la mort était annoncée, de morne en morne, au son de la conque de lambi. Le dernier conteur de veillée mortuaire de l'île confie son sentiment sur notre rapport actuel à la mort, notre tendance à la fuir, et à abandonner progressivement les traditions qui lui donnaient un sens.
" Autrefois, la veillée mortuaire faisait partie d'un monde ritualisé, avec des codes très précis ", indique Alain Légares. " La veillée se déroulait dans cinq espaces distincts. Il y avait la pièce où le mort était exposé, puis l'espace où l'on chantait en latin, les cantiques chrétiens, et la cuisine où l'on préparait la soupe et le "chodo" pour les convives. A l'extérieur de la maison, un espace était réservé aux spécialistes de "tim tim". Un peu plus en retrait, il y avait le conteur entouré des "répondè". A cette époque, le seul moment où l'on pouvait entendre un conte, c'était lors des veillées mortuaires. Et là où il y avait le conte, il n'y avait pas d'enfant, c'était interdit ! " Alain Légares nous rappelle que les conteurs de veillée, comme les pratiquants de danmyé, étaient menacés d'excommunication par l'Eglise catholique. "
Dans le conte traditionnel martiniquais il n'y a pas de morale. Les histoires de "konpè lapen" ou "Ti Jean" vantaient les mérites du "débrouya pa péché", concept de la survie né au temps de l'habitation. "I té ka fè lafèt épi tout moun". Mais pour le conteur "la mort donne cette force de défier la vie, de manger la vie.
La veillée mortuaire, c'était la fête de la vie, à l'occasion de la mort. " La veillée était aussi le lieu de rencontre de la famille, le lieu du pardon et de la réconciliation. "Aujourd'hui, les veillées organisées dans des salles, n'ont plus de sens.
Autrefois, à la Toussaint, les cimetières reprenaient vie, les familles s'y retrouvaient. Mais on a fait un commerce avec tout cela. On a perdu tout ce qui nous ramenait à la famille. Je suis né à la campagne, de la même façon, j'ai vu la dégradation de cet environnement. Après l'arrivée de l'eau courante, la rivière est devenue un dépotoir. On n'a pas préparé les gens à la modernité, on les a amenés à détruire leur propre lumière."
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